Ubisoft: Charlie Guillemot devient co-PDG de la filiale financée par Tencent

AuteurArticle écrit par Vivien Reumont
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date de publication17/07/2025
Portrait d’un homme adulte en extérieur, regardant la caméra avec un léger sourire. Il a les cheveux courts et ébouriffés, mêlant du gris et du brun, ainsi qu’une barbe de quelques jours bien entretenue. Ses yeux clairs contrastent avec la douceur de son expression détendue. Il porte un t-shirt bleu-gris simple, et l’arrière-plan flou suggère un cadre naturel, avec des arbres verts en second plan sous un ciel légèrement voilé. La lumière est douce et diffuse, renforçant l’atmosphère paisible et naturelle de la scène. Ce type d’image pourrait être utilisé pour illustrer une interview de développeur de jeu vidéo, un créateur indépendant ou une figure du milieu vidéoludique dans un contexte informel.

Ubisoft, l’un des piliers historiques du jeu vidéo français, vient de franchir un nouveau cap dans sa restructuration interne. L’entreprise, fondée en 1986 par Yves Guillemot, reste manifestement une affaire de famille. En effet, Charlie Guillemot, fils du fondateur, a été officiellement nommé co-PDG d’une nouvelle filiale stratégique, aux côtés de Christophe Derennes, un vétéran de la maison. Cette filiale, financée en partie par le géant chinois Tencent, regroupera les licences les plus emblématiques de l’éditeur: Assassin’s Creed, Far Cry et Tom Clancy's Rainbow Six.

Cette décision intervient dans un contexte délicat pour Ubisoft, confronté à une image ternie par des scandales internes récents, une pression constante du marché, et une remise en question de ses pratiques managériales. Le retour de Charlie Guillemot n’a d’ailleurs pas fait l’unanimité en interne, certains employés s’interrogeant sur les critères de sa nomination.

Mais ce mouvement stratégique va bien au-delà d’un simple retour en famille: il symbolise aussi une nouvelle orientation pour Ubisoft, à un moment où l’entreprise doit redéfinir ses priorités et s’aligner avec les attentes d’un secteur en pleine mutation. La nomination d’un duo à la tête de cette filiale est censée insuffler une nouvelle dynamique, entre vision fraîche et expérience solide.

 

Qui sont Charlie Guillemot et Christophe Derennes ?

Présentation de Charlie Guillemot: parcours, départ en 2021, retour en mai

Charlie Guillemot n’est pas un inconnu dans les couloirs d’Ubisoft. Fils d’Yves Guillemot, il a très tôt été immergé dans l’univers du jeu vidéo. Après plusieurs expériences au sein de l’entreprise familiale, il cofonde Ubisoft Owlient, un studio spécialisé dans les jeux free-to-play, notamment Howrse, un succès dans son domaine. Charlie y démontre des compétences managériales notables, mais aussi une certaine compréhension des nouvelles tendances du marché.

Cependant, en 2021, il décide de quitter Ubisoft, à un moment où l’entreprise traverse des turbulences internes liées à des accusations de harcèlement et à des critiques sur sa culture d’entreprise. Ce départ a été interprété comme une volonté de se distancier d’un contexte difficile. Il en profite pour acquérir de l’expérience en dehors du groupe, renforçant ainsi sa légitimité auprès de certains observateurs.

Son retour en mai dernier n’est pas passé inaperçu. Certains employés ont exprimé des réserves, évoquant un risque de favoritisme et d’héritage mal digéré. Malgré cela, sa nomination au poste de co-PDG prouve qu’il conserve la confiance de la direction, mais surtout celle de son père, toujours à la tête du groupe Ubisoft.

Présentation de Christophe Derennes: 35 ans chez Ubisoft, expérience dans les studios Montréal et en Amérique du Nord

À ses côtés, Christophe Derennes fait figure de contrepoids expérimenté. Fidèle d’Ubisoft depuis 1988, il a occupé de nombreux postes de direction au sein de l’entreprise. Il a notamment dirigé les studios de Montréal, l’un des plus importants hubs de création du groupe, mais également joué un rôle clé en tant que directeur général pour l’Amérique du Nord.

Son parcours illustre une connaissance approfondie des rouages d’Ubisoft et de ses projets phares. Il a été impliqué dans le développement de nombreux jeux à succès, et sa vision stratégique est reconnue en interne comme un atout majeur.

Le duo formé avec Charlie Guillemot vise donc un équilibre entre jeunesse et innovation d’un côté, stabilité et expérience de l’autre. Une combinaison qui pourrait permettre de relever les nombreux défis à venir.

 

Pourquoi créer cette filiale avec Tencent ?

Objectifs de la nouvelle structure (regrouper Assassin’s Creed, Far Cry, Rainbow Six)

La création de cette filiale n’est pas anodine. Ubisoft a choisi de regrouper ses licences les plus lucratives — Assassin’s Creed, Far Cry et Tom Clancy’s Rainbow Six — sous une seule entité opérationnelle, signe d’une volonté claire de rationalisation. L’objectif est multiple: améliorer la cohérence des stratégies de développement, optimiser les ressources, mais surtout renforcer la puissance commerciale et créative de ces franchises.

Ces licences représentent à elles seules une part significative des revenus de l’éditeur. En les rassemblant, Ubisoft entend créer un pôle d’excellence qui pourra bénéficier d’un pilotage dédié, agile et autonome. Cela permet aussi de mutualiser les expertises entre équipes, de favoriser des synergies techniques, et de réagir plus rapidement face aux évolutions du marché.

Ce changement structurel vise donc à instaurer une nouvelle gouvernance plus efficace pour faire face à une industrie de plus en plus concurrentielle, où chaque retard ou échec peut coûter des millions.

Rôle de Tencent en tant qu’investisseur: enjeux financiers et stratégiques

L’implication de Tencent, géant chinois du numérique, dans cette filiale est un élément clé du dispositif. Déjà actionnaire chez Ubisoft, Tencent renforce ici son positionnement stratégique au sein du groupe. En finançant cette entité, le groupe asiatique s’offre une place de choix dans le cœur du portefeuille Ubisoft, tout en évitant une prise de contrôle frontale de l’entreprise mère.

Pour Ubisoft, ce partenariat est une bouffée d’oxygène financière: cela permet d’assurer des fonds conséquents pour le développement des projets sans puiser directement dans les ressources internes. C’est aussi une manière d’accéder plus facilement au marché chinois, toujours très complexe à pénétrer pour les éditeurs occidentaux.

Toutefois, cette alliance soulève aussi des questions sur l’indépendance créative de l’entreprise et sur la direction que pourraient prendre ces franchises à l’avenir. Si Tencent se contente pour l’instant d’un rôle de soutien économique, la gouvernance partagée devra s’assurer que les décisions stratégiques restent bien dans les mains d’Ubisoft.

 

Le co-PDG: une solution efficace ou un risque de népotisme ?

Réactions internes: inquiétudes des employés sur le retour de Charlie

Le retour de Charlie Guillemot n’a pas été accueilli avec un enthousiasme unanime. Plusieurs employés ont exprimé leurs craintes, parfois de façon anonyme, notamment sur les réseaux professionnels ou en interne. Certains y voient un cas typique de népotisme, une pratique souvent critiquée dans les grandes entreprises familiales, surtout dans un contexte où Ubisoft tente de redorer son image managériale.

« C’est une belle opération de communication, mais sur le terrain, ça grince », aurait confié un employé selon des bruits de couloir relayés par des médias spécialisés. Le timing du retour de Charlie, coïncidant avec des restructurations internes et une pression accrue sur les équipes, n’aide pas à dissiper les soupçons.

Ces inquiétudes sont d’autant plus vives que l’entreprise sort à peine d’un long cycle de remises en question autour de sa culture d’entreprise, de son environnement de travail et de sa gestion des talents.

Réponse de Charlie face aux accusations de favoritisme (extraits de son entretien à Variety)

Conscient de la controverse, Charlie Guillemot a tenu à répondre sans détour dans une interview accordée à Variety. Il ne nie pas ses liens familiaux, mais insiste sur son parcours personnel et sa légitimité professionnelle.

« Oui, je suis le fils d’Yves. Je ne m’en cache pas. Mais ma nomination ne concerne pas seulement mes liens familiaux ; elle concerne aussi ce dont Ubisoft a besoin en ce moment. »

Il rappelle qu’il a passé plus d’une décennie à travailler dans et hors d’Ubisoft, apprenant le métier à la fois de l’intérieur et à travers d’autres expériences. Il affirme avoir volontairement quitté le groupe pour ne pas être prisonnier de son patronyme, et pour mieux revenir avec un bagage solide.

« Ce qui compte maintenant, ce n’est pas mon nom, c’est le travail qui nous attend. Ubisoft se trouve à un moment charnière. »

Sa déclaration est construite sur un ton humble, presque stratégique: il se positionne comme un catalyseur, un facilitateur du changement. Il insiste également sur l’importance de s’appuyer sur les compétences déjà présentes dans l’entreprise pour avancer.

Le message est clair: il ne cherche pas à s’imposer comme "le fils de", mais comme un manager à part entière, prêt à accompagner une transformation profonde.

 

Défis et enjeux pour l’équipe dirigeante

Les priorités stratégiques à gérer: innovation, optimisation, cohésion des équipes

La création de cette nouvelle filiale s’accompagne de grands défis pour le duo Guillemot-Derennes. À commencer par l’innovation, un domaine où Ubisoft a perdu du terrain ces dernières années. Les critiques concernant le manque de prise de risque et la répétitivité de certaines franchises ne sont pas nouvelles. Aujourd’hui, l’enjeu est de redonner du souffle créatif à ces licences tout en les rendant plus pertinentes pour le public actuel.

Ensuite, la cohésion interne. La fusion des équipes autour de ces franchises majeures n’est pas seulement un jeu d’organigramme: elle implique des fusions de cultures de travail, d’outils, de process et de leadership. Il leur faudra harmoniser les méthodes sans étouffer les identités créatives des studios concernés.

Enfin, l’optimisation financière et technologique reste cruciale. Ubisoft doit réduire ses coûts sans sacrifier la qualité, tout en modernisant ses moteurs de jeux, ses pipelines de production et ses cycles de développement. En clair: faire mieux, plus vite et avec moins.

Le défi de redynamiser des licences majeures et d’assurer leur croissance

Les attentes autour de Assassin’s Creed, Far Cry et Rainbow Six sont immenses. Chacune de ces franchises a connu des sommets, mais aussi des phases de stagnation. Le vrai défi pour les nouveaux co-PDG est de relancer ces licences sans les dénaturer.

Cela passe par plusieurs leviers:

  • L’expansion vers d’autres formats (séries, mobile, VR, etc.).
  • Le retour à des mécaniques de gameplay plus audacieuses.
  • La construction d’univers narratifs plus cohérents et immersifs.
  • Et, bien sûr, la reconquête d’une communauté parfois désabusée.

Pour cela, il faudra aussi redorer la communication, redonner confiance aux fans et éviter les effets d’annonce sans lendemain. Le duo dirigeant devra incarner cette vision, et réussir là où Ubisoft a souvent été critiqué: dans la clarté, la transparence et l’exécution des promesses.

 


En quelques mots

La nomination de Charlie Guillemot et Christophe Derennes à la tête de la nouvelle filiale d’Ubisoft, financée par Tencent, marque un tournant stratégique pour l’éditeur français. Ce n’est pas seulement une affaire de famille: c’est une tentative de recentrage autour des piliers historiques de la marque, avec une gouvernance resserrée, une structure plus agile et une ambition renouvelée.

Si les doutes sur le népotisme persistent, Charlie Guillemot semble vouloir prouver qu’il est plus qu’un héritier. Soutenu par un dirigeant chevronné, il devra trouver l’équilibre entre continuité et rupture, entre héritage familial et innovation industrielle.

Ce duo a désormais la lourde responsabilité de revitaliser des franchises majeures tout en insufflant une nouvelle culture de travail, dans un contexte de transformation globale du secteur. L’avenir dira si ce choix est celui du renouveau ou du repli.

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Ubisoft

Leader mondial du jeu vidéo, créateur de franchises emblématiques comme Assassin's Creed et Far Cry, offrant des expériences immersives et innovantes.

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