Sony attaque Tencent pour Lights of Motiram: un clone d’Horizon?

AuthorArticle written by Allan Tylisz
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Publication date30/07/2025
Image promotionnelle du jeu vidéo fictif intitulé « Light of Motiram ». Au premier plan, une femme guerrière aux vêtements tribaux futuristes se tient à gauche, observant un vaste paysage. Elle est accompagnée d'une créature robotique ressemblant à un cerf, aux cornes lumineuses et translucides. Le décor est un mélange harmonieux de nature luxuriante et de haute technologie : montagnes enneigées à l’arrière-plan, vastes forêts verdoyantes, cours d’eau limpide, et structures humaines nichées dans la vallée. Plusieurs machines géantes à l’apparence animale dominent la scène : un immense robot humanoïde au centre, deux créatures volantes mécaniques semblables à des rapaces sur la droite, et d'autres créatures aquatiques métalliques émergent de l’eau au bas de l’image. Le tout est baigné dans une lumière bleue éclatante, évoquant une ambiance épique et mystique. Le titre "LIGHT OF MOTIRAM" est inscrit en lettres capitales blanches au centre de l’image. L’esthétique générale rappelle les jeux de science-fiction et d’aventure comme « Horizon Zero Dawn », mêlant nature sauvage et technologies avancées.

 

L’industrie du jeu vidéo n’a jamais été étrangère aux inspirations assumées, ni aux conflits ouverts sur la propriété intellectuelle. Mais lorsque Sony Interactive Entertainment décide de porter l’affaire devant les tribunaux, c’est que la coupe est pleine. En novembre dernier, Tencent dévoilait Lights of Motiram, un jeu d’action-RPG en monde ouvert développé par POLARIS QUEST, où des tribus armées de lances et d’ingéniosité affrontent des créatures mécaniques titanesques. Sur le papier, l’idée paraît séduisante. Dans les faits, elle sent le déjà-vu... très fort.

Presque immédiatement, la communauté comme les spécialistes ont crié à la copie. Il faut dire que Lights of Motiram ressemble trait pour trait à Horizon Zero Dawn, célèbre licence PlayStation née du talent de Guerrilla Games. L’univers post-apocalyptique peuplé de machines animales, la protagoniste semblable à Aloy, les environnements naturels verdoyants… tout y est. Au point que Sony y voit non pas une coïncidence, mais une imitation manifeste.

Le 27 juillet 2025, Sony a officiellement porté plainte contre Tencent auprès d’un tribunal californien, évoquant des violations de droits d’auteur et de marque déposée. Plus surprenant encore, la plainte révèle que Tencent avait approché Sony en 2024 pour une collaboration sur un nouveau jeu Horizon, offre que Sony a déclinée. Peu après, Tencent annonçait Lights of Motiram. Une coïncidence ? Pas selon le géant nippon, qui réclame aujourd’hui réparation et justice.

 

Genesis du conflit: présentation du jeu et des similitudes

Annonce du jeu en novembre 2024

Le 17 novembre 2024, Tencent créait l’événement lors de son showcase annuel en dévoilant Lights of Motiram. Ce titre, développé par le studio POLARIS QUEST, promettait une aventure riche en action, exploration et survie dans un monde ouvert vaste, peuplé de créatures mécaniques et de mystères tribaux. Très vite, les projecteurs se sont braqués non pas sur les qualités propres du jeu, mais sur son étrange ressemblance avec Horizon Zero Dawn, sorti en 2017 sur PlayStation 4.

Les premières images diffusées lors de la bande-annonce officielle mettaient en scène une jeune femme rousse, armée d’un arc, se déplaçant dans une jungle luxuriante à la poursuite d’une créature quadrupède en métal. Pour les fans, le parallèle était évident. Certains sont allés jusqu’à parler de “Horizon en free-to-play chinois”, un qualificatif qui a largement circulé sur les forums.

Tribu, machines et ambiance visuelle

Le cœur de la polémique repose avant tout sur l’ADN du jeu. Lights of Motiram se déroule dans un monde où des tribus utilisent des armes rudimentaires pour combattre des machines futuristes. Cet univers mêle technologie avancée et société primitive, une combinaison rare… mais déjà utilisée, et de manière magistrale, dans Horizon. L’atmosphère visuelle, elle aussi, emprunte les mêmes codes : grands espaces naturels, architecture tribale, paysages montagneux, cascades numériques et une esthétique de “technologie fossile”.

On pourrait croire à une simple inspiration, mais l’aspect quasi-mimétique des environnements pousse à s’interroger. Certaines séquences de gameplay présentées montrent des mécaniques de piratage, de crafting, et même d’approche furtive derrière des hautes herbes : des éléments emblématiques du gameplay d’Horizon.

Similarités dans les personnages et l’environnement

Le personnage principal de Lights of Motiram, Kaara, n’a pas seulement un design proche d’Aloy : elle partage aussi un arc narratif semblable, celui d’une paria découvrant un destin lié aux anciennes technologies. Là encore, les parallèles sont trop nombreux pour n’être que fortuits.

Même les ennemis mécaniques présentent des comportements proches : patrouilles, points faibles détectables via un scanner, démantèlement de composants mécaniques pour améliorer son équipement… Une mécanique qui, pour Sony, prouve qu’il ne s’agit plus d’un hommage, mais bien d’un clone.

“Le simple fait de changer les noms ou les textures ne suffit pas à faire d’un plagiat une création originale.”
— Extrait de la plainte déposée par Sony, Tribunal fédéral de Californie

 

Le pitch refusé de Tencent à Sony

Proposition lors du GDC 2024 (Aurora Studios)

L’un des éléments les plus troublants révélés par la plainte de Sony est l’existence d’un contact préalable entre les deux géants. En mars 2024, lors de la Game Developers Conference (GDC) à San Francisco, des représentants de Tencent Aurora Studios ont présenté à Sony un pitch confidentiel : celui d’un jeu en collaboration basé sur la licence Horizon. L’objectif était clair : co-développer une expérience Horizon multijoueur destinée aux marchés asiatiques, avec une technologie partagée et un co-branding entre les deux firmes.

Selon les documents présentés au tribunal, Sony aurait poliment refusé, expliquant vouloir garder un contrôle créatif exclusif sur l’univers de Guerrilla Games. Rien d’anormal jusque-là… sauf que moins de six mois plus tard, Tencent annonçait Lights of Motiram, projet portant une ressemblance frappante avec Horizon — jusque dans sa structure narrative et son identité artistique.

“Il est difficile de ne pas établir un lien direct entre le projet proposé à Sony, et le jeu que Tencent a finalement développé de manière indépendante.”
— Rapport judiciaire, Tribunal du district nord de Californie

Rejet par Sony et poursuite du développement en secret

Sony n’avait pas donné suite à la proposition, estimant que la vision créative de Tencent ne respectait pas les codes établis par Guerrilla Games. Mais selon Sony, Tencent aurait conservé les documents présentés lors de cette rencontre — dont certains éléments confidentiels — pour alimenter le développement de son propre jeu. Bien que cela ne constitue pas, en soi, une infraction directe, cela rend le contexte encore plus sensible.

POLARIS QUEST, le studio en charge de Lights of Motiram, n’a jamais caché ses ambitions : créer un action-RPG mondialement reconnu. Toutefois, les timelines de développement (avec un prototype jouable dès fin 2024) soulèvent de sérieuses interrogations. Peut-on concevoir un monde aussi complexe en quelques mois sans s’inspirer d’un projet déjà bien établi ?

Enfin, Sony souligne que Tencent n’a jamais contacté Guerrilla Games pour obtenir une licence ou proposer un quelconque partenariat après le refus initial — un signe, selon la firme japonaise, que l’objectif n’était pas de créer un hommage, mais bien un produit concurrent, basé sur des fondations illégalement empruntées.

 

Ce que Sony reproche: griefs juridiques précis

Violation du droit d’auteur et de la marque

Au cœur de la plainte déposée par Sony se trouvent deux accusations majeures : la violation des droits d’auteur et la contrefaçon de marque déposée. Sony affirme que Lights of Motiram reproduit de manière délibérée et systématique des éléments originaux protégés de la franchise Horizon, notamment son univers, ses personnages, ses créatures mécaniques et même certains motifs visuels. Il ne s’agit donc pas d’une simple ressemblance fortuite, mais d’un emprunt intentionnel et structuré.

En matière juridique, il est important de noter que les idées générales — comme celle de “tribus contre machines” — ne sont pas protégées par le droit d’auteur. Ce sont les expressions spécifiques de ces idées, comme la direction artistique, les mécaniques de gameplay ou les designs, qui peuvent faire l’objet de poursuites. Et c’est justement sur ces éléments concrets que Sony construit son attaque.

Exemples concrets cités dans la plainte

Dans le document juridique soumis au tribunal, plusieurs comparaisons visuelles sont apportées. L'une montre l’écran de sélection d’armes de Lights of Motiram, qui ressemble fortement à celui d’Horizon Forbidden West. Une autre capture montre Kaara chevauchant une monture mécanique à quatre pattes dans un désert rougeoyant — un clin d'œil difficile à ignorer au second opus de la franchise de Guerrilla.

Sony cite également des similarités de narration : protagoniste orpheline élevée en marge d’un clan, découverte de ruines technologiques interdites, révélation d’un passé caché lié à une ancienne civilisation avancée... tous ces éléments seraient, selon eux, copiés avec un degré de précision alarmant.

“Le produit final développé par Tencent ne présente pas une inspiration ou un hommage, mais une appropriation manifeste des éléments qui définissent l'identité d'Horizon.”
— Extrait officiel de la plainte de Sony, Juillet 2025

Utilisation de la réaction médiatique et des comparaisons publiques

Un autre aspect clé de l’argumentaire de Sony réside dans la réaction du public et des médias. Depuis la diffusion de la première bande-annonce, les forums comme Reddit, les chaînes YouTube spécialisées et même les articles de presse n’ont cessé de comparer Lights of Motiram à Horizon, parfois en termes peu flatteurs.

Sony se sert de cette réception comme preuve indirecte de la confusion créée, soulignant que même les joueurs les plus aguerris ne parviennent pas à distinguer clairement les deux univers. Ce type de confusion est un élément souvent retenu dans les affaires de contrefaçon de marque, car il montre une atteinte à l’identité commerciale.

En s’appuyant à la fois sur des éléments tangibles et sur l’opinion publique, Sony construit une affaire robuste, visant non seulement à protéger ses créations, mais aussi à dissuader de futures tentatives d’imitation dans l’industrie.

 

Les conséquences attendues: injonction et dommages‑intérêts

Montant demandé et base légale ($150 000/infraction)

Dans sa plainte déposée au tribunal californien, Sony demande des dommages et intérêts considérables, s’appuyant sur les textes de loi encadrant la propriété intellectuelle aux États-Unis. La firme japonaise estime que chaque élément copié représente une infraction distincte, ce qui pourrait faire grimper l’amende totale à plusieurs millions de dollars. Conformément aux lois américaines, la pénalité peut atteindre 150 000 dollars par infraction en cas de violation délibérée du droit d’auteur.

Sony affirme que l’utilisation des éléments protégés par Lights of Motiram n’est pas accidentelle, mais le résultat d’un processus de reproduction structuré et prémédité. Cette intentionnalité renforcerait leur droit à réclamer le maximum légal prévu, d’autant plus que Tencent est accusé d’avoir agi malgré un refus formel de collaboration.

Mesures demandées (interdiction, destruction de matériel marketing)

Outre les compensations financières, Sony réclame des mesures conservatoires fortes : l’arrêt immédiat de toute promotion, production et distribution de Lights of Motiram, y compris les versions numériques, physiques, démos et supports marketing. Ils demandent également la destruction de tout matériel promotionnel contenant des visuels ou concepts jugés illicites, afin de limiter la propagation du contenu contesté.

Cette demande d’injonction vise à empêcher Tencent de tirer des bénéfices commerciaux d’un jeu qui, selon Sony, repose sur un vol de propriété intellectuelle. Si la cour accède à cette requête, cela pourrait entraîner un gel complet du projet — voire son abandon pur et simple, sauf refonte massive.

“Nous ne poursuivons pas seulement pour être dédommagés, mais pour défendre le droit fondamental des créateurs à ce que leurs idées soient protégées.”
— Déclaration de Jim Ryan, président de Sony Interactive Entertainment

Limites possibles: juridiction et zone d’application

Cependant, tout n’est pas joué d’avance. L’une des principales limites de cette action réside dans la juridiction géographique. La plainte a été déposée en Californie, donc ses effets sont potentiellement limités au territoire américain. Tencent, opérant principalement en Chine, pourrait continuer la distribution du jeu dans d’autres pays à moins qu’un accord international ou une décision parallèle ne soit obtenue.

De plus, même si les similitudes sont troublantes, les avocats de Tencent pourraient arguer que les éléments en question sont génériques ou inspirés de mythologies variées, ce qui affaiblirait l’accusation. Il faudra donc observer attentivement si la cour estime que les ressemblances vont au-delà du simple genre commun pour atteindre le plagiat pur et simple.

 

Implications pour l’industrie du jeu vidéo

Tendances des clones et des contentieux récents (ex. Palworld)

Le cas de Lights of Motiram n’est pas isolé. Depuis quelques années, l’industrie du jeu vidéo voit émerger une prolifération de titres fortement inspirés de franchises à succès. L’exemple le plus célèbre reste Palworld, souvent surnommé “Pokémon avec des flingues”, qui a lui aussi suscité de vifs débats sur la limite entre hommage et copie.

Cette multiplication des “clones” pose une question essentielle : où tracer la frontière entre inspiration légitime et vol créatif ? Les outils de développement modernes, comme Unreal Engine 5 ou Unity, permettent à de plus petits studios de reproduire rapidement des mécaniques complexes, rendant plus difficile encore la distinction entre coïncidence et imitation.

Les conflits juridiques deviennent donc une arme stratégique pour les détenteurs de licences, qui cherchent à protéger leur marque et à dissuader toute concurrence perçue comme injuste.

Enjeux de la protection de la PI dans les jeux AAA

Pour des entreprises comme Sony, la propriété intellectuelle est au cœur de leur modèle économique. Une franchise comme Horizon ne se limite pas à un jeu : elle englobe des produits dérivés, des adaptations télévisées, et constitue un pilier majeur du catalogue PlayStation. Protéger cette IP revient donc à défendre des investissements colossaux, tant en marketing qu’en développement.

Avec la montée en puissance des studios asiatiques, souvent financés par des géants comme Tencent ou NetEase, la crainte d’une exploitation opportuniste des licences occidentales devient de plus en plus présente. Des projets comme Wukong, Black Myth, ou Dark Tide se rapprochent dangereusement d’univers préexistants. Ce climat tendu accentue la pression sur les studios pour verrouiller légalement leurs créations.

Scénarios possibles pour l’issue du procès

Plusieurs issues sont envisageables. La première, et la plus probable, serait un règlement à l’amiable entre Sony et Tencent. Cela pourrait inclure une somme versée par Tencent, l’abandon ou la transformation profonde de Lights of Motiram, voire un partenariat ultérieur sous conditions strictes.

Si le procès se poursuit, il pourrait créer un précédent majeur. Une victoire de Sony renforcerait le droit des développeurs à revendiquer l’originalité de leurs œuvres, même dans un genre partagé. À l’inverse, une défaite serait perçue comme un feu vert aux studios souhaitant exploiter la zone grise de l’inspiration “appuyée”.

Dans tous les cas, ce litige pourrait inciter les studios à mieux documenter leurs processus créatifs et à éviter certaines zones à risque, surtout dans un marché mondial où la visibilité entraîne presque systématiquement la surveillance juridique.


 

En quelques mots

L’affaire opposant Sony à Tencent autour de Lights of Motiram dépasse la simple dispute entre deux géants du jeu vidéo. Elle incarne une lutte symbolique pour la défense de la créativité originale, dans un secteur où les inspirations croisées deviennent monnaie courante. Si les similitudes entre Motiram et Horizon peuvent sembler troublantes, le verdict final reposera sur des nuances juridiques complexes et des preuves tangibles.

Au-delà du cas particulier, ce procès marque une alerte pour toute l’industrie : l’innovation ne peut exister sans protection, et les créateurs ont besoin d’un cadre juridique solide pour défendre leurs univers. À l’heure où les technologies de développement permettent de recréer (ou de cloner) presque n’importe quelle expérience, les questions de droits d’auteur, de marque déposée et d’originalité sont plus cruciales que jamais.

Qu’il s’agisse d’un clone manifeste ou d’un simple malentendu créatif, Lights of Motiram risque bien de devenir un cas d’école, surveillé de près par tous les acteurs de l’industrie. Et dans cette jungle numérique peuplée de créatures mécaniques, la guerre pour la propriété intellectuelle ne fait que commencer.

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